Stéphane – Des ombres sur la route

Il ne porte pas de nom – ou, pour être plus juste, il s’en fera un plus tard find out here now. Lorsqu’il surgit, on ne lui connaît qu’un prénom, Stéphane, comme récolté au hasard de la loterie de l’existence. Manière de suggérer que le personnage aurait sans doute pu s’incarner dans n’importe lequel de ces jeunes Occidentaux en mal de repères, lâchés sur les chemins du Levant pour toutes les bonnes et les mauvaises raisons du monde – bon, d’accord, surtout les mauvaises. D’où, c’est d’emblée son grand attrait lorsque Daniel Ceppi fait paraître à compte d’auteur sa toute première aventure, avant de le remettre en selle dans les pages d’(À Suivre), un portrait nuancé, sans complaisance – très loin en tout cas de l’imagerie du voyageur cool idéalisé ad nauseam par les années 70. Les pérégrinations erratiques de Stéphane, on se les imagine plutôt rythmées par la bande-son désabusée d’un Gérard Manset, avec un éventail d’humeurs et de facettes à l’avenant : velléitaire, hésitant, malade, ambigu, veule, fragile… Bref, un « héros » exactement à l’image de ce que recherche alors cette nouvelle revue de bande dessinée aux ambitions inédites : des personnages éminemment réels, au plus près de la complexité et de l’ambivalence humaines. Comme avant eux un autre Suisse (le Nicolas Bouvier de L’Usage du monde et plus encore du Poisson-Scorpion), Stéphane et Ceppi dégommeront aussi au passage, et avec profit, la plupart des illusions du folklore routard. On ne s’en est pas plus mal porté depuis.

• Première apparition : (À Suivre) 37, février 1981

(AS) 37

Nicolas Finet

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